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comptera.12. Il faut affirmer que nous avons un c%u0153ur, que notre c%u0153ur coexiste avec les autres c%u0153urs quil%u2019aident %u00e0 %u00eatre un %u201ctu%u201d. Comme nous ne pouvons pas d%u00e9velopper longuement ce th%u00e8me, nousciterons un personnage de roman, Stavroguine de Dosto%u00efevski. [8] Romano Guardini le d%u00e9critcomme une incarnation m%u00eame du mal, car sa principale caract%u00e9ristique est d%u2019%u00eatre sans c%u0153ur : %u00abStavroguine n%u2019a pas de c%u0153ur, son esprit est donc quelque peu froid et impitoyable, et son corpsest empoisonn%u00e9 par l%u2019inertie et la sensualit%u00e9 bestiale. Il ne peut donc pas atteindre les autreshommes, et aucun d%u2019entre eux ne peut vraiment l%u2019atteindre, car c%u2019est le c%u0153ur qui cr%u00e9e lespossibilit%u00e9s de rencontre. C%u2019est par le c%u0153ur que je suis aux c%u00f4t%u00e9s de l%u2019autre et que l%u2019autre estproche de moi. Seul le c%u0153ur peut accueillir et donner un asile. L%u2019intimit%u00e9 est l%u2019acte, la sph%u00e8re duc%u0153ur. Stavroguin, cependant, est une personne distante, [...] il est tr%u00e8s loin, y compris de luim%u00eame, car la partie la plus intime de l%u2019homme se trouve dans le c%u0153ur et non dans l%u2019esprit.L%u2019int%u00e9riorit%u00e9 qui r%u00e9side dans l%u2019esprit n%u2019est pas le propre de l%u2019homme. Mais quand le c%u0153ur n%u2019est pasvivant, l%u2019homme n%u2019est pas en lui-m%u00eame, mais %u00e0 c%u00f4t%u00e9 de lui-m%u00eame %u00bb. [9]13. Il faut que toutes les actions soient plac%u00e9es sous le %u201ccontr%u00f4le politique%u201d du c%u0153ur, quel%u2019agressivit%u00e9 et les d%u00e9sirs obsessionnels se calment dans le bien le plus grand que leur offre lec%u0153ur et dans sa force contre les maux ; il faut que l%u2019intelligence et la volont%u00e9 se mettent %u00e9galement%u00e0 son service, en sentant et go%u00fbtant les v%u00e9rit%u00e9s plut%u00f4t qu%u2019en voulant les dominer comme certainessciences ont tendance %u00e0 le faire ; il faut que la volont%u00e9 d%u00e9sire le bien le plus grand que le c%u0153urconna%u00eet, et que l%u2019imagination et les sentiments se laissent mod%u00e9rer par le battement du c%u0153ur.14. En d%u00e9finitive, on pourrait dire que je suis mon c%u0153ur, car c%u2019est lui qui me distingue, me fa%u00e7onnedans mon identit%u00e9 spirituelle et me met en communion avec les autres. Les algorithmes %u00e0 l%u2019%u0153uvredans le monde num%u00e9rique montrent que nos pens%u00e9es, et ce que d%u00e9cide notre volont%u00e9, sontbeaucoup plus %u201cstandards%u201d que nous ne le pensions. Elles sont facilement pr%u00e9visibles etmanipulables. Il n%u2019en va pas de m%u00eame pour le c%u0153ur.15. Le mot %u201cc%u0153ur%u201d est important pour la philosophie et la th%u00e9ologie qui cherchent %u00e0 r%u00e9aliser unesynth%u00e8se. En effet, le mot %u201cc%u0153ur%u201d ne peut %u00eatre %u00e9puis%u00e9 par la biologie, la psychologie,l%u2019anthropologie ou toute autre science. Il fait partie de ces mots originels %u00ab qui d%u00e9signent lesr%u00e9alit%u00e9s de l%u2019homme qui lui reviennent dans la mesure o%u00f9 il est pr%u00e9cis%u00e9ment un %u00eatre complet (entant que personne corporelle et spirituelle) %u00bb. [10] Ainsi, le biologiste n%u2019est pas plus r%u00e9aliste que lesautres lorsqu%u2019il parle du c%u0153ur, car il n%u2019en voit qu%u2019une partie ; or le tout n%u2019est pas moins r%u00e9el, il l%u2019estm%u00eame davantage. Un langage abstrait ne pourrait pas non plus avoir la m%u00eame significationconcr%u00e8te et int%u00e9grante en m%u00eame temps. Si le %u201cc%u0153ur%u201d nous conduit au plus profond de notrepersonne, il nous permet aussi de nous reconna%u00eetre dans notre globalit%u00e9 et pas seulement dans unaspect isol%u00e9.16. D%u2019autre part, cette force unique du c%u0153ur nous aide %u00e0 comprendre pourquoi il est dit que,4